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Mercredi 22 novembre, les dĂ©putĂ©s europĂ©ens rĂ©unis Ă  Strasbourg ont donnĂ© leur feu vert au traitĂ© commercial entre l’Union europĂ©enne et la Nouvelle-ZĂ©lande. Celui-ci prĂ©voit d’éliminer totalement les droits de douane sur les exportations europĂ©ennes Ă  destination du pays.PrĂšs de quatre ans aprĂšs son dernier traitĂ© commercial conclu avec le Vietnam, l’Union europĂ©enne (UE) s’apprĂȘte Ă  finaliser un nouvel accord de libre-Ă©change avec la Nouvelle-ZĂ©lande. SignĂ© le 9 juillet par la Commission europĂ©enne et le gouvernement nĂ©o-zĂ©landais, le projet vient de franchir une nouvelle Ă©tape ce mercredi 22 novembre avec une large approbation des dĂ©putĂ©s europĂ©ens (524 pour, 85 contre, 21 abstentions).
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Viande et produits laitiers néo-zélandais

L’Union europĂ©enne exemptera quant Ă  elle de droits de douane 98,5 % des importations nĂ©o-zĂ©landaises actuelles. Celles-ci sont aujourd’hui dominĂ©es par les produits agricoles, comme la viande ovine, le kiwi et le vin. “L’exportation de viande rouge et de produits laitiers, sur lesquels les nĂ©gociations ont Ă©tĂ© rudes, devraient gĂ©nĂ©rer ‘plus de [500 millions d’euros]’ supplĂ©mentaires pour la Nouvelle-ZĂ©lande dans les sept ans Ă  venir”, estimait en juillet le New Zealand Herald.

Des quotas d’exportations ont Ă©tĂ© fixĂ©s pour le beurre, le fromage ou encore le lait en poudre. Tandis que 163 indications gĂ©ographiques europĂ©ennes portant sur des denrĂ©es alimentaires, et l’intĂ©gralitĂ© de celles concernant les vins et spiritueux de l’UE, sont protĂ©gĂ©es. Ainsi, un fromage n’aura par exemple pas le droit d’ĂȘtre commercialisĂ© en Nouvelle-ZĂ©lande sous le nom de “feta” s’il n’obĂ©it pas aux normes europĂ©ennes de production de ce fromage grec.

Entre autres mesures, le traitĂ© garantit Ă©galement un traitement non discriminatoire aux investisseurs de l’UE en Nouvelle-ZĂ©lande et vice-versa. Il vise par ailleurs Ă  faciliter les flux de donnĂ©es et le commerce en ligne entre les deux territoires. 

Droit du travail et environnement

Le traitĂ© est enfin assorti d’engagements sociaux et environnementaux. Premier du genre conclu par l’Union, il prĂ©voit la possibilitĂ© de sanctions en dernier recours en cas de violation grave des principes fondamentaux du droit du travail ou de l’Accord de Paris sur le changement climatique. D’autres engagements ont Ă©tĂ© intĂ©grĂ©s en matiĂšre d’économie circulaire, de dĂ©forestation, de tarification du carbone et de protection de l’environnement marin. “L’accord de libre-Ă©change tĂ©moigne d’un engagement fort en faveur de la coopĂ©ration internationale, de la sĂ©curitĂ© de l’emploi et de la prospĂ©ritĂ©â€, a ainsi dĂ©clarĂ© sur X (ex-Twitter) le rapporteur allemand du texte au Parlement europĂ©en, Daniel Caspary (PPE).

Plusieurs fĂ©dĂ©rations d’éleveurs français, notamment dans le secteur de la viande ovine, avaient cependant exprimĂ© leurs vives inquiĂ©tudes vis-Ă -vis de cette concurrence nĂ©o-zĂ©landaise. Tout comme plusieurs associations Ă©cologiques et dĂ©putĂ©s europĂ©ens, elles soulignaient l’utilisation par les agriculteurs du pays de substances chimiques interdites sur le sol europĂ©en, comme l’atrazine ou le diflubenzuron.

Le vote des députés français

“Il s’agit en effet de l’accord de libre-Ă©change le plus progressif sur lequel nous avons eu Ă  nous prononcer. Mais on ne peut pas voter en faveur de cet accord qui va mettre en concurrence nos producteurs avec ceux de Nouvelle-ZĂ©lande”, a ainsi dĂ©plorĂ© le dĂ©putĂ© europĂ©en RaphaĂ«l Glucksmann (S&D, France), en soulignant la position minoritaire des dĂ©putĂ©s français au sein du groupe S&D. Un constat similaire Ă  celui de ses collĂšgues français Ă©cologistes et de La France insoumise. Les dĂ©putĂ©s français du groupe Renew Europe ont en revanche soutenu le texte. 

ConformĂ©ment Ă  la procĂ©dure prĂ©vue pour ce type d’accords, les membres du Parlement europĂ©en n’ont le choix qu’entre approuver et rejeter le texte, sans possibilitĂ© d’adopter des amendements. Le Conseil devrait quant Ă  lui valider le texte dĂšs lundi, ouvrant la perspective d’une entrĂ©e en vigueur Ă  la mi-2024.

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Un appel aux dĂ©putĂ©s europĂ©ens avait Ă©tĂ© lancĂ© pour s’y opposer

Appel aux dĂ©putĂ©s europĂ©ens : « Votez Non Ă  l’accord UE-Nouvelle-ZĂ©lande ! »

A quelques jours de la COP28 sur le climat, le Parlement europĂ©en va se prononcer sur l’accord de libĂ©ralisation du commerce UE-Nouvelle-ZĂ©lande qui va conduire Ă  importer sur 20 000 km des dizaines de milliers de tonnes de viande, lait, fromage, beurre, pommes, kiwis pourtant Ă©galement produits sur le sol europĂ©en. Ce texte appelle les dĂ©putĂ©s europĂ©ens Ă  voter contre sa ratification.

L’accord de libĂ©ralisation du commerce entre l’UE et la Nouvelle ZĂ©lande arrive pour ratification les 21-22 novembre au Parlement europĂ©en. Pleinement soutenues par Emmanuel Macron, les nĂ©gociations ont dĂ©butĂ© en 2018. Elles se sont poursuivies pendant la pandĂ©mie de COVID19, dans la plus grande opacitĂ©, alors qu’il ne manquait aucun dirigeant politique pour promettre Ă  l’opinion publique un processus de relocalisation des activitĂ©s jugĂ©es « stratĂ©giques ».

Trois ans plus tard, les Parlementaires europĂ©ens doivent se prononcer sur un accord qui prĂ©voit la suppression de la quasi-totalitĂ© des droits de douanes sur les biens et services Ă©changĂ©s entre l’UE et la Nouvelle-ZĂ©lande. Selon l’étude d’impact de la Commission europĂ©enne, il pourrait gĂ©nĂ©rer une hausse de 30% des Ă©changes. Ce sont des milliers de containers supplĂ©mentaires qui vont transiter sur les ocĂ©ans de la planĂšte alors qu’il faut environ 40 jours pour que l’un d’entre eux rejoigne un port europĂ©en depuis Auckland.

Au bout de sept ans de mise en Ɠuvre, pourront ĂȘtre importĂ©s sans droit de douane depuis un pays situĂ© Ă  20 000 km de l’UE (dĂ©tails dans la note de dĂ©cryptage de l’Aitec)  :

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  • pommes, kiwis, oignons, vin, poissons, crustacĂ©s, miel, etc sans limite
  • 38 000 tonnes de viande ovine
  • 10 000 tonnes de viande bovine
  • 15 000 tonnes de beurre
  • 25 000 tonnes de fromage
  • 15 000 tonnes de lait en poudre

Cette mĂȘme Ă©tude d’impact prĂ©voit une augmentation nette des Ă©missions de gaz Ă  effet de serre liĂ©e au transport de marchandises et Ă  la hausse des productions qui vont ĂȘtre exportĂ©es : produits agricoles de Nouvelle-ZĂ©lande, vĂ©hicules automobiles et produits industriels et de consommation de l’UE. A quelques jours de la COP28 sur le climat, le Parlement europĂ©en va-t-il entĂ©riner un accord qui aggrave la crise climatique, avec la bĂ©nĂ©diction des Etats-membres de l’UE, dont la France ?

PrĂ©sentĂ© par la Commission europĂ©enne comme « le plus progressiste » des accords, ce qualificatif en dit plus en dit plus sur l’insoutenabilitĂ© des autres accords que sur la prĂ©tendue exemplaritĂ© de celui-ci. La « rĂ©ciprocitĂ© des normes dans les importations » promise depuis des annĂ©es par Emmanuel Macron n’est toujours pas au rendez-vous. Les agriculteurs nĂ©ozĂ©landais ont en effet le droit d’utiliser des produits tels que l’atrazine et le diflubenzuron, deux substances chimiques jugĂ©es toxiques et interdites d’utilisation sur le sol europĂ©en respectivement en 2003 et 2021.

Bruxelles et Paris se fĂ©licitent que l’accord comprenne « une mesure miroir exemplaire » permettant de ne pas importer de la viande de bovins engraissĂ©s en feedlots (centres d’engraissement industriels). Sauf qu’il n’y a quasiment pas de feedlots en Nouvelle-ZĂ©lande, l’élevage bovin s’appuyant historiquement sur le pĂąturage.

D’autre part, seules des violations trĂšs graves de l’accord de Paris sur le climat (sortie de l’accord) et des normes fondamentales de l’OIT pourraient faire l’objet de sanctions dans le cadre du chapitre sur le dĂ©veloppement durable de l’accord. C’est trĂšs peu probable et, surtout, la nature mĂȘme de l’accord n’est pas transformĂ©e : il s’agit toujours d’accroĂźtre les flux commerciaux entre les deux parties, sans que ces flux ne soient conditionnĂ©s Ă  une amĂ©lioration des conditions sociales et Ă©cologiques des filiĂšres concernĂ©es. Enfin, les violations des engagements pris en matiĂšre de biodiversitĂ©, de fin des subventions aux Ă©nergies fossiles, de lutte contre la dĂ©forestation et de surpĂȘche, d’égalitĂ© des sexes, de responsabilitĂ© des entreprises ne pourront pas faire l’objet de sanctions.

Autant de raisons qui ont conduit une cinquantaine d’organisations de la de la sociĂ©tĂ© civile, dont une vingtaine d’organisations françaises (ActionAid, Aitec, Amis de la Terre, Attac, Bloom, CGT, ConfĂ©dĂ©ration Paysanne, FSU, Fondation pour la Nature et l’Homme, France nature Environnement, GĂ©nĂ©rations Futures, Notre Affaire Ă  Tous, Veblen Institute et le collectif national Stop CETA/Mercosur), Ă  publier un appel pour que les parlementaires europĂ©ens ne ratifient pas cet accord !

Le collectif national Stop CETA-Mercosur affirme qu’il n’est pas possible de prĂ©tendre mettre en oeuvre le GreenDeal europĂ©en et ratifier un accord qui va aggraver le rĂ©chauffement climatique et conduire Ă  importer des biens dĂ©jĂ  produits sur le sol europĂ©en depuis l’autre bout de la planĂšte. Raison pour laquelle il appelle les internautes Ă  Ă©crire aux dĂ©putĂ©s europĂ©ens par une action en ligne afin d’obtenir leur engagement Ă  voter CONTRE la ratification de l’accord.

Plus d’infos : www.collectifstoptafta.org